Meetic, un mythe ?

Il suffit de cliquer sur le net et les célibataires en mal être, désireux de faire des rencontres, n’ont que l’embarras du choix.

 

Toute une série de sites déferlent sur le marché : meetic, premier club de rencontre européen, suivi de meetic affinity, go, B2, superencontre, rencontre.com, net club. Chaque jour de nouveaux adhérents s’y inscrivent, allant parfois de l’un à l’autre pour tenter de trouver l’âme sœur. Un véritable parcours du combattant.

 

Un pseudo, un clic

Sophie a voulu en savoir davantage sur les fans de ces fameux sites et décide elle-même de s’inscrire sur l’un d’eux. Ils ne sont pas gratuits. Avant, elle a dû choisir l’offre la plus alléchante car les tarifs eux aussi varient suivant le temps : 20 euros pour 2 mois, 35 euros pour 3 mois, 60 euros pour 6 mois. Il y a aussi la carte premium avec les VIP. Elle hésite pour le coût ! Les candidats se présentent sous forme de fiche avec une bande annonce, un pseudo et un mot de passe, leur âge (à vérifier), leurs goûts, leur désir sur la personne de leur choix : séduisante autant que possible. Un vocabulaire spécifique afflue : chat, visite, flash on line of line. Les pseudos : caméléon, tchanquet 33, roockencool, bingo 33, électron 119, super sexy, mikemistral n’incitent guère à une envolée lyrique. Au hasard, qui est bingo 33 ? Veuf, 58 ans, commerçant, cherche personne pour partager moments de vie. Homme, 45 ans, cherche femme entre 30 et 35 ans, après expérience douloureuse, aime promenades en montagne, rando, voyages, sorties. Les profils abondent, certains y mettent leur photo ou tout un album ; brusquement vous partagez ainsi l’intimité d’un inconnu qui compte vous flasher. Une réponse est attendue. Immédiatement après l’inscription, Sophie se voit flasher par Mikemistral, Power 33, Mosovite 24, Marin Pêcheur 58. Hop, elle clique. Vous avez des chances de tomber amoureuse car vous avez 75 % d’affinité avec Mike. Immédiatement la magie s’opère : ton profil m’intéresse, peux-tu m’envoyer ta photo ?

Un défilé de visage apparaît, les uns rieurs, d’autres plus maussades, affichant leur mensuration, leurs loisirs. Le marché est effervescent, le choix infini, le contact est simple, un clic.

 

Devinons-nous

Vous y ajoutez une demande de « devinons-nous » avec des questions bateaux, quel est votre jeu préféré ? Aimeriez-vous habiter un appartement, la campagne, une maison ? Les mails succèdent aux mails. L’imagination se met en route : est-il grand, beau, généreux, ce Mikemistral ? Sophie observe sa photo, le portrait semble sympathique, il a de beaux yeux rieurs. Elle répond enfin sur flash successifs de ce prétendant pressé. Ils se donnent rendez-vous devant l’église de Gradignan. Elle se dirige vers le parking, aperçoit le fameux Mike traverser le trottoir, tenant en laisse un bouledogue couvert de bandelettes blanches. Elle n’avait qu’une envie : faire volte-face mais trop tard, il est déjà là. Elle découvre le personnage, couvert de bijoux Hermès. Avec consternation, son regard se porte sur ses pieds de Geisha. Elle n’aime pas les minitoys ! Ne pouvant échapper au rendez-vous, elle propose de prendre un pot pour faire connaissance. Impossible, lui déclare-il ; et le chien ? Impossible d’ailleurs d’avoir toute conversation car le malheureux animal, en souffrance, suite à une opération, n’a cessé d’aboyer. Le mâle propose une ballade dans le parc à proximité. Sophie n’arrive pas à entendre son interlocuteur, chaque parole est interrompue par un aboiement. Ses bottes à talons s’enfoncent dans le terrain humide. Elle doit traverser un pont où coule un ruisselet. Plouf, l’animal y plonge. Mike, son prétendant, affolé s’écrie « Sophie, vite, plongez, mon chien va se noyer et je ne sais pas nager. » Calme, elle regarde Mike qui, au comble de l’angoisse, s’écrie : « Dépêchez vous, il va mourir. » Le chien, instinctivement agite ses pattes et revient vers le bord, il est recouvert d’algues. Mike, ressuscité, a passé tout son temps à nettoyer son animal chéri. Sophie fait tapisserie ; elle n’est pas à la hauteur : l’enjeu est trop important, elle ne peut rivaliser avec le chien.

Tchao Mike ! Elle lui envoie un mail : « Je ne suis pas une meuf qui aime les cleps aboyeurs, alors bon vent Mikemistral ! Larguez les amarres. »

 

Elisabeth Gillon

( Février 2011)